Frédéric Meuwly

Mon parcours

 

Vendanges 2020 – En Lavaux – Suisse

Dans la mesure où mon histoire s’inscrit dans un sillon hors du commun, c’est sous une forme hors du commun que je vous la présente.

Tout a débuté par un “problème”, celui de ne pas être désiré !

Pour le quidam, ce fait peut passer inaperçu, mais pour une personne sensible, ce peut être un drame. Le désir étant le moteur de l’existence, je suis donc « né pour ne pas exister ». Séparé de ma mère et placé durant une année chez une nounou maltraitante et peu stimulante, mon « statut » de non désiré s’est confirmé.

J’ai ensuite été récupéré par des grands-parents affectueux et bienveillants. Il faut dire que j’étais un petit garçon adorable, car mon credo était celui de ne pas déranger. Dix mois plus tard, je regagnais une famille composée d’un père adoptif et d’une petite sœur. Naîtront ensuite deux petits frères. J’appris à l’âge de quinze ans l’affiliation réelle d’un « papy » pour lequel j’ai souvent été de trop. Je reçus cette information sans le moindre état d’âme et sans la moindre curiosité.

Ne pas déranger à l’école m’a poussé à prendre la place du fond à gauche, ou à droite. Celle de l’élève qui ramène de bonnes notes, mais pas trop non plus, afin de ne pas être remarqué. Seule la gymnastique me posait un problème, car j’étais peu souple et peu endurant, vite essoufflé. A contrario, excellent en mathématique, en géométrie, en algèbre et en dessin, j’acceptai une place de formation en tant que géomaticien CFC, alors que j’aurais préféré devenir architecte. Premier du canton en dessin et en géométrie, je développais par ailleurs en autodidacte les logiciels de la profession en langage Basic sur les premiers pocket-computers.

De retour d’un séjour aux États-Unis, où j’ai œuvré en tant qu’assistant technique dans l’expertise de structures métalliques, je décrochai un premier emploi de concepteur DAO/CAO de zones industrielles. Préposé à des formations pour la gestion des serveurs informatiques, j’y renonçai cependant pour postuler et décrocher un emploi d’animateur socio-culturel aux Écoles à la montagne de la ville de Lausanne, à Château d’Oex. C’est alors que je butai sur un problème majeur. Alors que mon corps affichait 22 ans sur le compteur de mon existence, mon mental se cantonnait dans la préadolescence.

À force ne pas exister, la construction de mon identité s’est interrompue le 24 octobre 1987 dans une sorte de déflagration du « moi ». Cela s’est traduit par des voix qui me dictaient des ordres ainsi qu’une vie scindée : lumineuse et sociale le jour en tant qu’animateur ; obscure, retranchée et solitaire la nuit, soit durant mes périodes de congés et de vacances, en tant que mystique dans l’attente d’une mission salvatrice pour l’humanité ! Six années s’écoulèrent avant que mes absences de plus en plus fréquentes incitent mon employeur à me déclarer auprès de l’assurance invalidé en Suisse.

Je fis alors deux rencontres. Celle du psychiatre souhaitant me médiquer et m’interner, et celle de Mme Elie Christen, une physiothérapeute expérimentée, qui constata de nombreuses adaptations (dites négatives) de ma verticalisation : Scoliose, lordose, cyphose, bassin oblique, cage thoracique en inversion, pieds plats et souffle court. Après trois mois d’étirements sur les chaînes musculaires avec le Souffle profond, les voix se turent… Après cinq ans de traitement, je repris le cours d’une existence normale, avec la rage de vouloir enfin exister.

Je me formai alors en tant qu’éducateur spécialisé HES, puis informaticien CFC et enfin un CAS de spécialiste dans les bilans d’orientation et l’intégration socioprofessionnelle (PPH/EAP) de jeunes en difficultés, souffrant pour la plupart de troubles dits psychologiques. (TDA-H, Asperger, TSA, constellation des DYS, bipolaire, dépression, etc.). Je poursuivis le traitement morpho-psychothérapeutique durant lequel ma thérapeute, fondatrice de cette méthode, m’enseigna les fondamentaux. (2001-2004)

C’est en 2007 que s’opéra ce que Karl Gustav Jung nomme une synchronie, soit une conjonction d’événements qui donnent sens à toute une vie.

Alors que je statuais sur une rente à vie pour deux messieurs contemporains, informaticiens et diagnostiqués schizophrènes, je pris conscience du parcours que mon médecin traitant qualifia de « hors-norme ». Je débutai alors l’écriture de mon premier livre, SCHIZO, de la chute au rétablissement.

S’ensuivirent quinze années de la pratique de mon métier, à constater l’état chronique des « troublés mentaux » soignés avec des pilules et des psychothérapies, alors que personnellement je me réalisais pleinement dans l’existence. Pourquoi eux, et pas moi ?

Je pressentais que la fracture « corps-mental », fondamentalement ancrée dans notre culture cartésienne et mécaniste, constituait le “bogue” des soins de l’homme dans sa globalité.

En 2014, je reçus les derniers enseignements théoriques, mais également philosophiques, de Mme Christen, alors qu’elle séjournait en EMS. À la publication de mon livre en 2017, je m’installai en tant que morpho-psychothérapeute et reçus mes premiers patients. Réalisant que les séances de thérapie devaient impérativement être complétées par une pratique régulière et autonome, je rédigeai alors mon second livre, La santé mentale rétablie dans ton corps, qui pose quelques fondements théoriques de la pratique MPTS, présente quelques postures ré-adaptives mais également déplore sur la base de constats, un système éducatif et psychiatrique qui oublient ce que nous sommes avant tout, notre corps.

Grâce aux séances de thérapie à distance, je réalisai que de nombreux lecteurs pratiquant à domicile ne s’y prenaient pas correctement, ou encore, progressaient trop rapidement dans la pratique des postures. Regroupant alors ma créativité et mes savoir-faire techniques et pédagogiques, je développai les formations en ligne, suffisamment explicites dans la partie gratuite afin d’en faire profiter le plus grand nombre, et additionnées d’un support de formation : Du mental au corps.

À ce jour, morpho-psychothérapeute par le Souffle, pédagogue, fondateur et animateur de ce site, mais aussi auteur, je planche sur mon prochain essai/livre : Le chemin à l’envers. Basé sur le postulat que ce n’est pas l’intelligence artificielle qui ressemble de plus en plus à celle de l’homme, mais bien l’homme qui s’adapte à la partie rationnelle, aseptisée et ennuyeuse de cette forme réduite d’intelligence. Cette humanité qui, se dirigeant vers un « meilleur des mondes », présente effectivement bien des signes de… schizophrénie.

Elie Christen (1927-2016)
Thérapeute en harmonisation par le Souffle

Née entre les deux guerres, cette physiothérapeute de la première heure fut une curieuse, une battante, une féministe, mais aussi une pragmatique qui gravit les échelons de la profession jusqu’à devenir cheffe du service de réadaptation de l’hôpital cantonal vaudois, actuellement le CHUV[1]. Trois influences majeures marquèrent le développement de sa pratique : Mme Françoise Mézières, kinésithérapeute, dont elle fut l’élève, avec qui elle comprit les liens entre les tensions psychologiques et les contractions sur les chaînes musculaires puis les dégénérescences sur la formation du squelette ;

Maître Taisen Deshimaru, passeur de la pratique du Zen en Occident dont elle fut la disciple, avec qui elle comprit la pratique et le rôle du Souffle profond dans la régénérescence des cellules ; le Dr Karlfried Graff Durkheim, psychologue et art-thérapeute d’influence Zen, dont elle fut la patiente, avec lequel elle comprit l’encapsulage du corps dans ses structures morpho-psychologiques une fois la croissance terminée. Forte de ces influences, et de bien d’autres encore, elle quitta le « système » hospitalier qui l’encombrait de ses normes, de ses formulaires et de ses protocoles pour s’installer et proposer la MPTS. J’eus la chance de la rencontrer l’été 1994 alors que sa technique était aboutie et que personnellement, j’étais au plus mal.

[1] Centre hospitalier universitaire vaudois, à Lausanne en Suisse.